Les Murmures du Vent

LES MURMURES DU VENT

[Article paru le 26 novembre 2011, augmenté et re-publié ce jour]

(Sirta la gal ba)

Pays : IRAK
Année de production : 2009
Date de sortie : 31 MARS 2010
Genre : COMÉDIE DRAMATIQUE
Durée : 77 MIN
Réalisateur : SHAHRAM ALIDI
Production : TAW FILM
Acteurs : OMAR CHAWSHIN, MARYAM BOUBANI, FAKHER MOHAMMAD BARZANI, VALID MAROUF JAROU, MOHARAM HOSSEIN GHADER
Distribution : LES ACACIAS
Prix SACD, prix Acid-CCAS, prix Ofag-TV5 (Cannes 2009)

Je me dis tout de même que notre cinéma Lumière de La Ciotat vaut vraiment le détour. Loin des gigantesques complexes à la mode, le cinéma Lumière montre chaque jour qu’il n’a pas vendu son âme au diable du « tout commercial à outrance ». L’existence de cette programmation « Arts et Essais » en témoigne.

Au fil des semaines, ces films particuliers – confidentiels, très souvent – nous ouvrent magnifiquement à d’autres cultures, à d’autres pays, à d’autres langues et traditions. Ce fut le cas pour Tehroun-Téhéran » que nous avons évoqué il y a quelques temps ici. Le film « Les Murmures du Vent » nous appelle au voyage, qu’il soit extérieur ou intérieur.

Il n’est pas fréquent de pouvoir regarder un film Kurde-Irakien. Quelles images ! Les paysages à couper le souffle, ces personnages plus vrais que nature, cette poésie !… Ici, tout est suggestions et métaphores. Loin de laisser indifférent, nous nous laissons emporter par ce film qui met en scène un vieux postier – Mam Baldar (l’Oncle aux ailes) – qui parcourt le Kurdistan irakien avec son magnétophone avec lequel il enregistre des messages sur cassettes audio qui permettent à différents personnages de communiquer. Le cheminement parfois vertigineux de Mam Baldar mène à une évocation du génocide kurde (entre février et septembre 1988, sous le règne de Saddam Hussein, plus de 180.000 Kurdes furent massacrés)…

L’on se rend compte à quel point l’information peut représenter le mal absolu… Quelle image que ce vieil homme aveugle, ligoté contre un arbre aux branches duquel pendent des centaines de postes radio confisqués (qui avaient été réglés sur des fréquences interdites)… Ce voyage nous transporte au fil des drames et des beaux moments de cette histoire humaniste jusqu’à ce cri final… Le cinéaste cite le poète indien Rabîndranâth Tagore (1861-1941) : « Chaque naissance d’enfant est un message témoignant que Dieu n’a pas encore perdu l’espoir en l’homme. »

Il faut se souvenir que ce lieu – l’Irak – loin de toutes considérations politiques, ne se trouve pas n’importe où : entre le Tigre et l’Euphrate. « Entre deux fleuves » qui se traduit en grec « meso potamia ». Eh oui : sur cette terre, l’ancienne Mésopotamie, il y a des milliers d’années, les plus belles civilisations, les plus riches également, virent le jour. Je veux parler des Sumériens et des Akkadiens. C’est en Mésopotamie qu’apparut l’écriture à la fin du IVe siècle. Mais, me direz-vous, quel rapport avec l’Irak d’aujourd’hui ? Bien sûr, il y a bien longtemps que la langue sumérienne ou la langue akkadienne (sémitique) ne sont plus pratiquées. Mais la tradition permet de garder ce lien qui – aussi ténu soit-il – attire notre attention. Mais d’abord observons rapidement les principaux états qui constituaient la Mésopotamie :

Source Wikipédia

5 500 tablettes archaïques (écriture cunéiforme) furent trouvées à Uruk, Suse, Djemdet Nasr, Kish ou Ur. La culture de l’Uruk (protohistoire de la Mésopotamie) se développa entre 6500 et 3700 avant notre ère. Les fouilles archéologiques dans la cité d’Uruk fournit un nombre considérable de découvertes et c’est à la fin de l’époque de l’Uruk qu’apparut l’écriture.

On peut se rendre compte que le nom actuel d’Irak n’est pas très éloigné d’Uruk. Revenons un instant à la tradition. La littérature mésopotamienne est d’une telle richesse ! Celle-ci nous livre entre autres ce personnage héroïque, roi de la cité d’Uruk (vers 2650 avant notre ère) : j’ai nommé Gilgamesh. Présent dans plusieurs récits épiques, on le retrouve particulièrement dans l’Epopée de Gilgamesh, oeuvre principale de la Mésopotamie antique. La première version complète connue a été rédigée en akkadien dans la Babylonie du XVIII e ou XVII e siècle av. notre ère ; écrite en cunéiforme sur des tablettes d’argile, elle s’inspire de plusieurs récits, en particulier sumériens, composés vers la fin du IIIe millénaire.

Or dans le film « Les Murmures du Vent » on entend une femme prononcer une prière qui – à plusieurs reprises – fait mention de Gilgamesh ! Et telle L’épopée de Gilgamesh, le thème central est la quête de l’immortalité, la quête d’identité.

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Synopsis : Mam Baldar, l’oncle aux ailes, exerce depuis bien longtemps le métier de postier dans différents villages de montagne au Kurdistan Irakien. Mais il n’est pas un postier comme les autres puisqu’il transmet des sons et des paroles enregistrés sur des cassettes. Un jour, un commandant des partisans, loin de chez lui, demande d’enregistrer les premiers pleurs de son enfant qui va naître prochainement. En se rendant dans ce village, le postier découvre que tous les enfants ainsi que la femme du commandant ont été conduits dans une vallée éloignée afin d’assurer leur sécurité, et il se met donc en route pour les rejoindre là où ils sont.

A propos du Kurdistan

Le Kurdistan (signifiant littéralement « Pays des Kurdes » ; en kurde : Kurdewarî, anciennement transcrit Koordistan, Curdistan, Kurdie) est une région géographique et culturelle d’Asie occidentale, majoritairement peuplée par les Kurdes. Cette région s’étend dans le sud-est de la Turquie, dans le nord-est de l’Irak, dans le nord-ouest de l’Iran et sur deux petites régions au nord-est et au nord-ouest de la Syrie. Sur ces quatre pays, seuls deux reconnaissent officiellement une région sous la dénomination de « Kurdistan » : l’Iran avec sa province du Kordestan et l’Irak avec sa région autonome du Kurdistan.
Etymologie : La région du Kurdistan est connue par plusieurs termes apparentés au mot Kurde au cours de l’Antiquité. Les Sumériens l’appelaient Kur-a, Gutium ou encore le pays de Karda, les Élamites Kurdasu, les Akkadiens Kurtei, les Assyriens Kurti, les Babyloniens Qardu, les Grecs Carduchoi et les Romains Corduene.
Le génocide kurde (surtout connu sous le nom d’Anfal) ordonné par le régime irakien de Saddam Hussein a lieu de février à septembre 1988, conduisant à l’élimination de plus de 180 000 civils kurdes. L’épisode le plus célèbre de ce génocide est le bombardement aux gaz chimiques de la ville kurde d’Halabja le 16 mars 1988…
Source Wikipédia

Aperçu de la carte du Kurdistan :

 »Kurdish Lands (location map) 1992 »’ (public domain).
Source : Perry-Castañeda Library Map Collection at The University of Texas at Austin

Filmographie du réalisateur Shahram ALIDI :

  • 1987 Mameli 20 min
  • 1988 Shote 30 min
  • 1999 The Heavenly Doors (Darhaye Beheshti)
  • The Old Wooden Doors of Sanandaj Kurdistan 15 min
  • The Children of the World (Bacheh-haye jahan) 20 min
  • 2000 The Ground is Hard, The Sky is Far (Zamin sakht-o-Asseman Dour) 20 min
  • 2003 The last Uncounted Village (Akharin Roustaye Sarshomari nashodeh) 14 min 30
  • Dreamless Village (Roustaye bi roya) 15 min
  • Butten (Dokmeh) 13 min
  • 2005 The Breath (Nafass) 20 min
  • 2006 Mountains of Teheran (Kouh-haye Tehran) 20 min
  • 2008 Quatrain of Water (Robaeiye Ab) 12 min
  • 2009 Les Murmures du Vent (Zemzemeh ba bad) 77 min

Quelques liens :

Le film :

Kurdistan :

La mésopotamie :

Gilgamesh et l’Epopée de Gilgamesh :

Commentaires

Une réponse à “Les Murmures du Vent”

  1. […] scène du film kurde-irakien « Les Murmures du Vent » (Sirta la gal ba) [article] où l’on entend une femme prononcer une prière qui – à plusieurs reprises – fait […]

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